Quelle structure juridique pour porter la CPTS ?

La CPTS nécessite d’être portée par une structure juridique avec une personnalité morale. Celle-ci peut être déjà existante et « labellisée » CPTS en cours de vie, ou créée ex nihilo afin de porter la CPTS. A ce jour, « l’association déclarée est en l’état la forme juridique la plus adaptée aux CPTS »[1] et les CPTS déjà créées s’appuient sur des associations. En effet, la structure associative, régie par la loi de 1901[2] et caractérisée par sa grande souplesse, permet de porter une CPTS :

L’objet social d’une association peut contenir les missions imparties aux CPTS, à savoir la « réalisation des objectifs du projet régional de santé »[3] : coordination des professionnels de santé afin de proposer aux patients du territoire une garantie d’accès au médecin traitant, assurer des plages de soins non programmés, organiser le lien ville / hôpital, les activités de prévention, etc.
L’ensemble des membres composant une CPTS[4] peuvent être membres d’une association. Ainsi, peuvent adhérer des professionnels libéraux de santé, des structures associant ces professionnels (SCP, SEL, SISA), des structures de santé de droit public ou privé (centres hospitaliers, cliniques privées), des structures médico-sociales et sociales, voir même aussi des collectivités territoriales et leurs émanations, des associations de patients, etc.
Les associations peuvent percevoir des fonds de l’ARS et de l’assurance maladie. L’Accord Conventionnel Interprofessionnel( ACI) signé en juin 2019 et qui organise le financement des CPTS, permet à une association de percevoir des fonds puisqu’elle n’impose pas aux acteurs de se constituer sous une forme juridique particulière.

L’association bénéficie donc d’un avantage certain par rapport à d’autres structures de coordination dans le domaine sanitaire. Certaines d’entre elles ne peuvent pas porter de CPTS comme par exemple les sociétés interprofessionnelles de soins ambulatoires (SISA), qui n’admettent pas d’associé personne morale et dont l’objet est strictement encadré par le code de la santé publique[5]. D’autres structures pourraient convenir mais présentent des contraintes opérationnelles par rapport à l’association. Ainsi, dans un groupement d’intérêt économique (GIE), les membres du groupement sont tenus des dettes de celui-ci sur leur patrimoine propre[6], ce qui constitue en pratique un frein pour des professionnels de santé qui intègrent déjà parfois à reculons les structures de coordination. Dans le cas des groupements de coopération sanitaire (GCS), les acteurs sociaux (exerçant une activité autre que médicale) ne peuvent être membres de ce groupement que sur autorisation du directeur général de l’agence régionale de santé (ARS)[7].

Il faut ajouter que le régime de l’association laisse une grande liberté dans la rédaction des statuts, ce qui est important compte tenu de la variété des projets de CPTS. Dans ce contexte, la réflexion autour d’une gouvernance efficace et équilibrée doivt être au cœur des préoccupations des acteurs lors de la réflexion autour des statuts, dans des communautés qui pourront compter à terme plusieurs centaines de membres avec des objectifs parfois divergents.

Enfin, rappelons que les modalités de constitution d’une association sont souples. Il n’est pas nécessaire de faire valider les statuts par l’ARS et sa création n’exige pas d’immatriculation au RCS mais simplement une déclaration en préfecture.

Toutefois, le régime de l’association présente aussi des limites, qui tiennent surtout au cadre très contraint dans lequel il est possible de rémunérer des membres ou les indemniser pour la participation à des réunions ou des missions, puisque l’association ne permet pas le partage des bénéfices entre ses membres[8].

Pour y remédier, des modifications législatives sont envisagées dans les mois qui viennent afin d’envisager une structure juridique sur mesure pour porter les CPTS. Ainsi, l’article 19 du projet de loi santé en cours de discussions parlementaires habilite le gouvernement à prendre toute mesure relevant du domaine de la loi permettant de favoriser le développement des CPTS notamment « en créant de nouveaux cadres juridiques » afin de « permettre le versement d’indemnités, de rémunérations ou d’intéressements, collectifs ou individuels, aux personnes physiques et morales qui en sont membres ». A ce jour, les pouvoirs publics restent néanmoins flous quant aux modifications envisagées, mais également sur la nécessité même de modifications législatives[9]. En outre, si un nouveau type de structure est créé, quid des associations déjà existantes ? Il convient donc de rester attentif dans les mois qui viennent…

[1] ARS, Constituer une CPTS en Île-de-France – Guide pratique, 2017

[2] Loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association

[3] Article L. 1434-12 du code de la santé publique

[4] Article L. 1434-12 du code de la santé publique

[5] Article L. 4041-1 et suivants du code de la santé publique

[6] Article L. 251-6 du code de commerce

[7] Article L. 6133-2 du code de la santé publique

[8] Article 1er de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association

[9] Rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé, Vol. II, enregistré le 14 mars 2019, page 172